"L'escalier, toujours l'escalier qui bibliothèque et la foule au bas plus abîme que le soleil ne cloche."

Robert Desnos,
Langage Cuit, 1923.

samedi 15 septembre 2012

... et le chant de tous

... y el canto de todos que es mi propio canto.

... et le chant de tous, qui est encore mon chant.
Violeta Parra, Gracias a la Vida, 1966.

En terminant sur cette allusion au « chant de tous », Violeta Parra ne songeait probablement pas aux foules qui allaient, avec une ferveur massacreuse, reprendre en chœur sa chanson devenue rengaine, et pas seulement à la Fête de l'Humanité...

Ce qu'elle avait enregistré, en  1966, un an avant de se donner la mort, était une ballade délicate, un merci à la vie qui résonnait comme un adieu :

Extrait de Las últimas composiciones de Violeta Parra, 1967.

L'interprétation que devait, dix ans plus tard, en donner Colette Magny, avec Mara à la guitare et Patrice Caratini à la contrebasse, suivait la même ligne de sereine mélancolie :

Extrait de Chili un peuple crève...,
enregistré en 1976 avec Maxime Le Forestier et Mara.
Cette chanson a été reprise sur le disque  Inédits et Introuvables, 
qui, non réédité, est bien sûr redevenu introuvable.

Si j'étais cohérent, je devrais en vouloir à Joan Baez dont le coup de pouce, dans son album de 1974 et surtout dans ses concerts, allait propulser cette chanson sur la scène mondiale avec une rythmique qui n'était pas vraiment la sienne...

Mais je ne suis pas cohérent.

Et puis, comment en vouloir à une grande interprète qui sait aussi prêter sa voix à de plus grandes, comme elle le fait ici :

Mercedes Sosa - La Negra - et Joan Baez, le 5 juin 1988 à Xanten, en Allemagne.

4 commentaires:

  1. Je crois bien que je ne connaissais que la version de Joan Baez – ma maman a le 33 tours…
    Merci, Monsieur Guy.

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  2. Je crois bien que j'ignorais jusqu'ici le nom de Violeta Parra, et je n'ai même pas le souvenir d'avoir entendu cette chanson magnifique vouée à la «ferveur massacreuse» des foules, que j'ai dû pourtant écouter souvent sur ce mien album de Colette Magny (qui donc me l'a piqué ?).

    Certains chants se suffisent quand on les parle autant qu'on les chante. Selon la tessiture, on les exhale et soupire (Violeta ; j'y verrais bien aussi la voix de Françoise Hardy), ou on les râpe et les aspire (Colette : les trémolos en moins, je la dirais-chanterais comme ça, a capella). La troisième version est épouvantable : orchestration, mise en scène et interprétation matraquantes, pour ce chant qu'on devrait entre tous laisser arriver de dessous la plante des pieds (faut le temps, on n'est pas maître), monter à son rythme jusqu'où il veut, et laisser s'échapper... Joan Baez est toute raide, masque de cire, poupée froide virtuose de sa légende, rien ne s'échappe, tandis que seul le visage de Mercedes est vivant, habité. Quant au public macramé-et-joie-de-vivre, euh...

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  3. En toute cohérence, je devrais ne pas aimer non plus la version d'Allemagne... Et pourtant.

    La rencontre des deux chanteuses doit me fasciner, assise/debout, une présence impressionnante et un professionnalisme un peu creux, et deux sourires...

    Mercedes Sosa a sans doute précédé Joan Baez pour populariser la chanson de Parra en Amérique du Sud, en l'adaptant à la puissance de sa voix.

    (On peut la voir et l'entendre ici : http://youtu.be/WyOJ-A5iv5I
    et là : http://youtu.be/rgMUtzk76eY - à Santiago du Chili )

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